Des fraises j’en ai goûté mais aucune n’a pu égaler cette saveur si particulière, encrée au fond de ma mémoire, celle de la fraise des bois. Même l’excellente mara n’arrive pas à sa hauteur
L’école était distante du village de deux kilomètres. Il n’y avait pas de bus. Le vélo était donc notre principal moyen de locomotion surtout aux beaux jours. Nous maudissions alors la côte à forte déclivité que nous devrions prendre tous les soirs pour retourner à notre logis. Trop pentue, l’hiver, elle ne permettait à aucun véhicule de la parcourir, nous donnant ainsi quelques jours de vacances supplémentaires. Mais cette côte recelait de véritables trésors : muguet, fleurs,champignons… Quand arrivait l’été, elle se tapissait d’un long tapis vert dans lequel était enfoui de petites tâches rouges, les fraises : c’était le signal.
Au premier week-end, armés de grandes bottes pour contrer les épines, et de nos pots à lait, nous partions à l’assaut des bois. Nous avions de quoi faire : au bout du village pas de route mais un long chemin de 7 km qui traversait la forêt. On savait ou elles se cachaient. Il leur fallait un peu de fouillis et beaucoup de lumière. C’était donc dans les coupes fraîches, au milieu des ronces que nous étions sûres de les trouver.
Elles s’étendaient à perte de vue et se blottissaient en grappe sur chaque pied. Très petites, la cueillette s’avérait longue mais le temps ne compte pas quand on aime et qu’on est heureux ! et puis, il y en avait tellement qu’on avait même pas besoin d’un casse-croûte. En fin de journée on obtenait un et parfois deux pots à lait complet sur lesquels, cette fois, nous nous gardions bien de tester les lois de l’apesanteur .
Invariablement, les fraises terminaient dans une grande jatte sur laquelle ma mère jetait quelques cuillères de sucre. Le soir, on les retrouvait dans notre assiette avec un peu de crème ou de fromage blanc en faisselle (maison, je précise) et nous nous régalions.
Mais la cueillette un jour dut s’arrêter. Goupil, le renart c’était mon pote. A travers mes lectures, je me délectais de ses déboires avec Ysengrin. Un jour j’appris qu’il était malade et contagieux. Renart avait la rage ! Une bête contaminée, ça bave là ou ça passe et a peut devenir dangereux. L’interdiction ferme de ramasser ce fruit fut donc proclamée.
Je n’ai jamais oublié la fraise des bois et sa saveur si particulière. Mon premier acte de propriétaire fut donc de planter des fraisiers. J’ai la fibre horticole mais absolument pas maraîchère. Ce fut un échec total. Las, au bout de quelques années, j’abandonnai mais sentimentalement j’ai laissé les plants coloniser mon jardin. Et puis un jour, il y en eut tellement qu’au fond d’une petite tasse, j’ai pu réunir une poignée de fraises. Alors tout naturellement j’ai jeté dessus un peu de sucre et 1/2 heures après je les ai dégusté avec un peu de crème fraîche et j’ai retrouvée la saveur perdue…
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